Richard Egarr - One Byrde in Hande - Res Musica
William Byrd est la figure centrale de l’école anglaise de clavier de la seconde moitié du XVIe siècle. Attaché à la Chapelle Royale, il a laissé de très nombreuses pièces vocales religieuses. Mais c’est son œuvre pour clavecin qui lui a valu son immense renommée et une influence par-delà les frontières, jusque chez Sweelinck. Dans cette époque tourmentée de l’histoire anglaise, les virginalistes s’empruntaient mutuellement des thèmes comme autant d’hommages réciproques. C’est le cas entre Byrd et Tallis, Bull et Gibbons. Le Fitzwilliam Virginal Book, précieuse compilation de la musique élisabéthaine pour clavier, est une source importante pour les pièces de clavecin de Byrd. On y trouve plusieurs des pièces enregistrées ici, les autres provenant du manuscrit intitulé My Ladye Nevells Book. La Lacrymae Pavan est construite sur un « tube » de l’époque écrit par John Dowland, que l’on retrouve glosé chez de nombreux autres compositeurs anglais. Le génie contrapuntique de Byrd est particulièrement mis en évidence dans la grande pièce sur Ut, ré, mi, fa, sol, la, où l’hexacorde ascendant sert de prétexte à une véritable gymnastique mentale en dix-sept variations. La dernière pièce du programme, The Bells, est un parfait exemple de musique descriptive, comme le sont les Batailles à la même époque. Elle est construite en neuf variations sur l’intervalle do-ré répété en basse obstinée cent dix-huit fois tout au long de la pièce. La sonnerie de départ évolue en un brouillard sonore d’où émergent de nouveaux thèmes au milieu des guirlandes de notes.
Le chef d’orchestre, claveciniste et organiste Richard Egarr dit avoir puisé son goût pour la musique élisabéthaine dans son expérience de petit chanteur dans les chœurs d’enfants de la cathédrale d’York. Plus tard, au cours de ses études de clavecin, la pièce The Bells de Byrd est devenue son Graal, et c’est cette dernière qui l’a conduit à construire le programme de ce disque. En donnant une place prépondérante aux pièces contrapuntiques plutôt qu’aux danses et aux variations sur des chansons, il n’a pas choisi la facilité. Il peut être difficile d’écouter à la suite ces pièces qui forment un véritable monument du contrepoint. De ce point de vue, les Fantaisies sont particulièrement exigeantes pour l’auditeur. On sait que les virginalistes écrivaient pour un cercle restreint d’amateurs éclairés. Toute restitution contemporaine de ces jeux de l’esprit représente une véritable gageure. Le pari est ici réussi grâce à un jeu très éloquent et à la richesse des timbres du clavecin de Joel Katzman, une copie d’un instrument de Rückers accordée au tempérament mésotonique.