Sandrine Piau - Handel: Enchantresses - Opéra Magazine
La voix de Sandrine Piau est toujours d’une jeunesse incroyable, le timbre n’a rien perdu de sa fraîcheur, et si quelques notes parmi les plus graves manquent parfois de consistance, le médium demeure rayonnant, et l’aigu d’une insolente souplesse. L’art de la cantatrice se joue de tous les obstacles – l’air d’Adelaide, déjà cité, également riche en notes piquées, ou le vertigineux « Tornami a vagheggiar » de Morgana (Alcina), que le texte de présentation semble attribuer au rôle-titre.
Mais n’allez pas croire que cette virtuosité se déploie gratuitement : elle est au service de l’expression, dans un parcours allant de l’accom- plissement amoureux au plus pro- fond désespoir – le fameux « Lascia ch’io pianga» en est le plus bel exemple.
À la tête de son ensemble Les Paladins, Jérôme Correas est un partenaire exemplaire. Les phrasés sont animés, et les couleurs instru- mentales sont franches (hautbois et trompettes se livrent à une joute amicale avec la chanteuse dans « Destero dall’empia Dite ») ; le ton péremptoire impose l’influx drama- tique nécessaire dans les trois ex- traits des Concerti grossi de l’opus 6 et l’Ouverture d’Amadigi.
Une jolie réussite, et l’un des récitals les plus convaincants d’une canta- trice plus que jamais indispensable au chant baroque.